Logement abordable : une structure de bois dans les immeubles allant jusqu’à 12 étages, est-ce possible? - Société d'habitation du Québec

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Logement abordable : une structure de bois dans les immeubles allant jusqu’à 12 étages, est-ce possible?

Par Nathalie Doyon

Afin de minimiser l’empreinte environnementale des grands immeubles d’habitation et d’encourager l’utilisation du bois, la Société d’habitation du Québec (SHQ) explore les possibilités d’intégration de bois massif dans les bâtiments allant jusqu’à 12 étages. Encore peu utilisé pour les usages d’habitation en Amérique du Nord, le bois massif d’ingénierie ouvre la porte à plusieurs possibilités de systèmes constructifs. 

Pour avoir un aperçu du coût environnemental et économique de ces solutions, la SHQ a proposé à un groupe d’architectes et d’ingénieurs chapeauté par Cecobois de se pencher sur le potentiel de conception du bois massif. Voici un survol des résultats de cette exploration.

La construction massive en bois 


Projet multilogement Arbora © Alexandre Parent / studiopointdevue.com Arbora LSR - Construction FGP

En complément à l’ossature légère majoritairement utilisée en habitation, la construction en bois massif d'ingénierie permet des bâtiments de plus grande hauteur. Ces systèmes structuraux sont des produits manufacturés qui optimisent la fibre de bois pour obtenir une résistance et une stabilité dimensionnelle supérieures. On en trouve une variété fabriquée au Québec : bois lamellé-collé (BLC), placages stratifiés (LVL), lamellé-croisé (CLT), etc. Chacun de ces systèmes possède ses avantages et peut être combiné avec d’autres matériaux, tels l’acier et le béton, pour former des structures hybrides alliant les forces de chacun. 

Le bois massif et la sécurité incendie

Un guide publié en 2015 par la Régie du bâtiment du Québec permet de concevoir et de construire des bâtiments sécuritaires de construction massive en bois allant jusqu’à 12 étages. Ce type de construction sera plus largement intégré dans la prochaine édition du Code national du bâtiment. 

La réaction du bois lors d’un incendie est prévisible et mesurable. Le degré de sécurité incendie du bois massif repose ainsi sur des dimensions minimales spécifiques, auxquelles s’ajoute une protection par un matériau incombustible (encapsulation), tel que le panneau de gypse. Les assemblages des planchers, murs et poteaux des habitations de plus grande hauteur doivent notamment former des séparations qui sont résistantes au feu pendant au moins deux heures.

Étude de concepts potentiels

Pour évaluer différentes possibilités, trois concepts structuraux ont été retenus par l’équipe d’architectes et d’ingénieurs. Ils consistent en un système gravitaire de type poutres et poteaux en bois lamellé-collé (BLC), combiné à différents systèmes de plancher : 

  • Concept 1 – Dalle sur pontage posée sur des poutrelles d’acier;
  • Concept 2 – CLT 3 plis posé sur des poutrelles d’acier;
  • Concept 3 – CLT 5 plis posé sur des poutres BLC.

Les objectifs budgétaires, l’empreinte environnementale, la performance acoustique et la facilité de mise en œuvre ont guidé les choix d’assemblage parmi les différentes options possibles.

Détails d’assemblage des trois concepts retenus

(Pour plus de détails, cliquez pour agrandir : concept 1 (324 Ko) | concept 2 (244 Ko) | concept 3 (277 Ko))


Superficie: 1208m2Plan d'un plancher typique
illustrant la trame structurale

(Cliquez pour agrandir)

Pour estimer les coûts de construction et l’empreinte carbone des trois systèmes constructifs, un bâtiment type basé sur des configurations courantes de multilogements a été proposé. 

La configuration des étages et le choix de la trame structurale sont principalement guidés par le positionnement du corridor, la dimension des pièces des logements et la structure d’un stationnement souterrain.

Les portées peuvent ainsi varier de 5,6 m à 8,2 m. Différents systèmes structuraux en bois permettent d’obtenir de telles portées et les plus courtes s’avèrent souvent les plus économiques. 

 

Synthèse comparative des concepts

Note 1 – Le coût au mètre carré du modèle de référence en béton comptabilise seulement les composants en lien avec la structure et l’assemblage  plancher - plafond (environ 17 % du coût total de la construction).

Note 2 – La variation du coût de construction des concepts (en %) par rapport au modèle de référence est calculée sur l’ensemble des coûts de construction du bâtiment (1 200 m² d’aire de bâtiment X 12 étages, 600 m² d’aire de bâtiment X 6 étages). 

Note 3 – La variation des émissions de GES (en %) par rapport au modèle de référence est calculée sur  les composants en lien avec la structure et l’assemblage  plancher - plafond.

Note 4 – Les évaluations génériques ont été réalisées à l’hiver 2020, en fonction des coûts et des stocks des systèmes de construction au Québec pendant cette période. Ces coûts généraux peuvent varier (emplacement, offre, disponibilité de la main-d’œuvre, etc.). 

L’analyse comparative démontre que le coût du béton au Québec est très compétitif. Par rapport au modèle de référence, les systèmes incluant le bois sont plus coûteux, mais ils émettent considérablement moins de GES et réduisent significativement le poids de la structure.

Conditions favorables à l'utilisation du bois 


Projet Origine © Stéphane Groleau

Bien que le contexte actuel favorise le béton pour le logement abordable de moyenne et grande densité, il est possible de dégager des conditions économiquement propices à l’utilisation du bois massif, en prenant en compte divers aspects : le type de sol, l’échéancier et la typologie du bâtiment, par exemple.

Faible capacité portante du sol et classe sismique élevée : Le type et la capacité du sol ont une incidence directe sur le choix de la structure et des fondations. Dans des conditions de sol de faible capacité portante, la légèreté d’une structure en bois pourrait permettre d’augmenter le nombre d’étages d’un bâtiment, d’éviter le recours coûteux aux pieux de fondation ou de limiter les charges latérales applicables à la structure. 

Échéancier de construction réduit : Le haut taux de préfabrication des éléments structuraux en bois accélère et simplifie le montage de la structure. Cette économie de temps permet une prise de possession plus rapide du bâtiment (qui peut être estimée à 2 mois pour un bâtiment de 5 étages) et contribue à rentabiliser les coûts du projet.

Projet Origine © Stéphane Groleau

Configuration et dimensions : De façon générale, la réduction du nombre d’étages et de la superficie du bâtiment pourra avantager une structure de bois. Les coûts au mètre carré d’une structure de béton ont tendance à augmenter pour un bâtiment de faible hauteur, étant donné les frais fixes de coffrage et de mobilisation du chantier. Cette observation a été constatée entre le modèle de 6 étages et celui de 12 étages.

La lourde empreinte environnementale de la structure

Le système structural représente une grande proportion des matériaux utilisés pour la construction des bâtiments. Le bois, un matériau à faible empreinte carbone, est une option intéressante par rapport aux standards actuels de construction de multilogements de moyenne et grande densité, principalement orientés vers l’utilisation de l’acier et du béton. 

L’étude sur les émissions de GES réalisée avec Gestimat démontre l’influence positive de l’utilisation du bois, même en incluant l’ajout de matériaux d’isolation et de panneaux de gypse, inhérents à la sécurité incendie et à la bonne performance acoustique de ce type de construction. Près de 9000 tonnes de GES peuvent être évitées pour le bâtiment type de 12 étages (ce qui représente environ les émissions de 700 voitures pendant un an).

Vers des solutions hybrides?

L’innovation dans les produits d’ingénierie en bois offerts sur le marché permet la construction en hauteur, ce qui répond au besoin de densification des villes. Les structures plus écologiques ont toutefois un coût. Le recours aux systèmes hybrides et l’optimisation des systèmes de bois massif suscitent l’intérêt et pourraient ouvrir la voie à de  nouvelles perspectives dans le domaine de la construction. L’expérimentation et le développement des compétences locales dans les années à venir permettront sans doute d’amener la construction de moyenne et grande hauteur vers ces habitations durables.

Pour plus d'information, écrivez à expertise.conseil@shq.gouv.qc.caCourriel.

Équipe de projet 

Gerald Beaulieu, ingénieur forestier, directeur, Cecobois 
Yvan Blouin, architecte, Yvan Blouin architecte 
Jean-Philippe Carrier, ingénieur, L2C 
Nathalie Doyon, architecte, Société d’habitation du Québec 
Caroline Frenette, ingénieure, Ph. D., conseillère technique, Cecobois 
Claude Lamothe, ingénieur, Intrabois 
Lucie Paquet, architecte, Lucie Paquet architecte

Collaboration

Christian Dagenais, ingénieur, Ph. D., FP Innovations
David Dompierre, ingénieur acousticien, SIBE Acoustique inc.
Daniel Richer, chargé de projet, Société d’habitation du Québec

Recherche réalisée de janvier à mars 2020 et financée par la Société d’habitation du Québec. 

Mise à jour : 10 novembre 2020

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